jeudi 17 août 2023

 CLAUDIE GALLAY

SEULE VENISE

EDITIONS BABEL

304 PAGES


Tanguer sur un vaporetto, rythmer son chagrin le long de cette cité lacustre, s'évaporer lentement dans l'eau claire des canaux devant l'horizon incertain , se cogner dans les rues désertes dans le silence divin de toutes ses églises. Oublier son histoire , les yeux rallumés devant le vert émeraude des portes et des volets , le rouge terre et le jaune éclatant des façades. Se laisser déborder par l'acqua alta, simplement vouloir se perdre dans Venise la Sérénissime. La ville des amours, la ville des abandons. 

Encore une fois, je suis restée là, dans le mélange inexprimable d'une fervente  mélancolie et d'un espoir en forme de poussée d'existence. Je suis décidemment amoureuse de cette écriture, de ces histoires aux intrigues simples presque minimalistes mais qui dans leur fluide ordinaire suspendent des vies de désenchantement en frénésie de vivre encore. Une puissance ivre et envahissante imprègne chaque ligne. Retrouver absolument le vertige de ce qui n'existe plus. Faire une émouvante révérence à ce silence qui en dit trop long et qui ne cherche plus à se taire. 

J'ai lu il y quelques temps "Les Déferlantes" de Claudie Gallay, roman coup de foudre , coup de foudre pour ce style elliptique , ces phrases courtes et incisives et tout cette mystérieuse ambiance qui habille chacun de ses romans. J'ai ainsi retrouvé cette griffe littéraire dans "seule Venise. Toujours et encore une héroine  sans nom, dont on sait très peu de choses finalement, et qu'il faut deviner et façonner.


Elle, elle a quarante ans , elle vient de se faire quitter par son compagnon. Paumée, en détresse, elle décide de s'exiler à Venise. Venise en hiver, comme son coeur. Parfaite osmose. Elle va loger dans la petite pension de Luiggi., propriétaire maniaque et reclus. Mais elle n'est pas seule, il y aussi ce prince russe déchu qui vit là depuis des années, il y a Maria la belle ballerine et son compagnon légèrement possessif. Puis il y a "lui" le libraire archiviste , amoureux des mots qui va dans chacune de ses phrases chacun de ses gestes ranimer quelque chose de brûlant en elle.. 

Un huis-clos de silences à apprivoiser à la merci du temps, ne plus garder sa vie soigneusement rangée mais comprendre qu'i y a des regards et des secrets qui guérissent à condition de vivre l'aventure merveilleuse de l'autre. Puis cessez de parler et sans à peine se retourner , reprendre miraculeusement le chemin de sa vie. 







 LE GRAND MEAULNES D'ALAIN -FOURNIER "Pour la première fois , Meaulnes sentit en lui cette légère angoisse qui vous saisit à la fin...